L’ambiance feutrée du collège de Juilly revêt des accents révolutionnaires. Jeudi, les professeurs et le personnel de la plus vieille institution scolaire de France ont cessé le travail. Comme la directrice avait fermé pour ce jour cet établissement privé sous contrat et renvoyé les 650 élèves chez eux, ils n’ont cependant pas eu à se déclarer grévistes. Mais quelques banderoles disposées sur les grilles donnaient le ton.
Le collège de Juilly, qui accueille des enfants externes ou internes de la maternelle à la terminale, connaît de graves difficultés financières. Mais dans cet établissement où les internes s’acquittent de 8000 € par an, il est difficile de faire payer plus les familles. « Il y a un million d’euros de dettes », avance une éducatrice. « Cela fait dix ans que la situation se dégrade, regrette le maire de Juilly, Daniel Haquin (SE). Il y a eu jusqu’à plus de mille élèves. Puis les résultats ont été un peu moins bons. Quel gâchis! » Un mandataire a été nommé par le tribunal de grande instance de Meaux. Il doit rendre son rapport très prochainement.
Jeudi, le supérieur général de l’Oratoire de France, l’autorité de tutelle du collège, s’est déplacé pour rencontrer les contestataires. « Il nous a présenté le projet de la directrice, qui prévoit de garder seulement le lycée et deux classes de troisième, soupirent les professeurs. Les primaires pourraient alors fusionner avec le cours Bottin, l’autre établissement privé du village. Mais le supérieur a ajouté que financièrement, ce n’est pas viable. »
Les classes de la maternelle à la 4e menacées
L’hypothèse de transformer les lieux en maison de retraite a été écartée par l’homme d’Eglise. « Nous travaillons à relancer ce collège très cher à notre cœur. Il fait partie de notre identité car notre fondateur est enterré ici, explique le supérieur. Nous devions rétablir la confiance des parents et l’image de l’établissement. C’est chose faite. Mais le contexte économique est très difficile. » Le supérieur assure cependant « ne pas être dans une dynamique d’élitisme mais d’enseignement de qualité ».
Enseignants et personnel ont bien du mal à croire en l’avenir de cet établissement dans lequel ils travaillent souvent depuis vingt ans. « Nous sommes très inquiets pour nos emplois, répètent les protestataires. Il y a déjà eu deux vagues de licenciements en cinq ans. On craint le départ d’une trentaine de personnes en plus. Soit un tiers de l’effectif. On ne sait même pas si les cours vont se poursuivre jusqu’à la fin de l’année. Mais l’Oratoire nous dit de garder la foi! »
La directrice du collège a envoyé un mot aux parents d’élèves leur expliquant la situation. « L’Oratoire travaille d’arrache-pied à la recherche d’une solution en vue d’assurer la pérennité du collège, assure-t-elle. La priorité actuelle est s’assurer la mission d’enseignement jusqu’à la fin de l’année. »
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